lyrics
Il faut reprendre possession, à commencer par les lieux les plus simples, ceux de notre enfance, où les souvenirs sont les plus chauds. Ensuite récupérer le temps, le vrai, pas celui qu'on nous fait croire; celui qui a toujours filé, indifférent à nos chimères. Tout pareil pour l'espace, briser les lentilles qui grossissent les ombres et durcissent le trait, les envoyer voler et voir tout ça de nos propres yeux. Reprendre possession de ce qu'on a le droit, parce qu'on est le seul juge et les autres sont fous.
Eux, ils scrutent l'horizon sans même bouger un cil, et chaque pet d'oiseau devient une tempête. Ils appellent la mort qui préfère se taire. Rien n'émane de leurs corps; ils sont secs, souches sans racines, et le vent leur fait croire que leurs branches poussent encore. Mais l'inertie est de ces forces qui n'attendent pas qu'on les commande; elle rattrape au vol les volontés que l'on s'épuise à lancer plus haut, toujours plus haut.
Il faut reprendre nos esprits et gifler ceux qui dorment debout, ceux qui ne tiennent plus que par le fil accroché à leur tête; si seulement leurs yeux se décollaient du sol, ils verraient à quel point l'horizon est loin là où la lune se lève, et se mettraient en route. Et apprendre à douter, quitte à marcher un peu moins vite, à attendre que l'instant se révèle dans son habit d'évidence et te dise : "Les bonnes questions amènent aux bonnes réponses".
Il faut reprendre possession et par essence il faut bouger, accélérer les flux qui courent dans nos veines et les artères bouchées éclateront d'elles-mêmes. Remonter le courant jusqu'à trouver la source, s'y pencher et boire jusqu'à déborder de plaisirs originels, laver à grande eau ces tumeurs qui s'agrippent à nos ventres.
Ceux qui possédaient hier ne possèdent rien d'aujourd'hui. Ceux qui possédaient hier ne possèdent rien d'aujourd'hui. Ceux qui possédaient hier l'ont cédé à la nuit, et dès l'aube on peut l'observer briser sa chrysalide et renaitre, vierge. Alors il faut se tenir prêts, debouts comme des hommes dans le champ des possibles, et choisir de quel bois aujourd'hui sera fait. Voir la nuit s'envoler comme un grand cerf volant noir, et bientôt ne distinguer qu'un petit point sombre avalé par l'azur. Voir le jour tomber comme une droite à la fatalité, comme le phoenix narguant son assassin. Être là, au bon endroit au bon moment et avoir toutes les cartes en main, distribuer les rôles et lancer la partie.
Il faut reprendre possession de soi; je n'appartiens à rien sinon à l'univers et au hasard. Je ne respecte rien que mes pairs et la terre qui m'a vu naitre. Je suis l'enfant que vous aviez laissé sur le bord du chemin, et je reviens vous dire que j'ai grandi.
credits
from
Transes,
track released September 3, 2013
Jordy Martin : contrebasse, surpeti, voix, composition, texte.
Enregistré, mixé et masterisé au studio DansMaChambre par Jordy Martin.
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